Martine Vermeylen : deux journées passionnantes avec Open dialogue

Beaucoup d’encre a coulé sur ce sujet et j’ai aussi entendu beaucoup de préjugés et de critiques. Avant de m’exprimer sur ce sujet, je voulais juger par moi-même en assistant aux deux journées de sensibilisation en français qui se sont déroulées le 8 et 9 mars à Baisy Thy.

Étant moi-même formée à la thérapie familiale dans les deux approches systémique et psychanalytique, j’ai donc écouté Nick Putmans de Londres traduit en simultané par les deux merveilleuses voix des traductrices compétentes. J’ai compris avec ma sensibilité de proche parent mais aussi mon expérience professionnelle de psychothérapeute familiale. Il y avait une cinquantaine de participants dont la plupart étaient des proches mais aussi des souffrants dit usagers et quelques professionnels : psychiatres, psychologues, thérapeutes et accompagnants. L’ambiance était conviviale avec beaucoup de participation et de témoignages dans la salle. Nick Putmans était très à l’écoute, il a aussi partagé son expérience.

Ce que Open Dialogue n’est pas ? Ce n’est pas une approche qui rejette les médicaments ni les psychiatres, ce n’est pas une méthode de guérison miraculeuse. Ce n’est pas une stratégie ni une technique. OD ne combat pas les symptômes.

Qu’est Open Dialogue ? Une approche inspirée de plusieurs courants de pensées et de pratiques depuis l’expérience du psychiatre écossais Ronald Laing qui a erronément été qualifié d’antipsychiatre. Il était un psychiatre engagé comme certains le sont encore aujourd’hui dans une pratique communautaire au travers des deux lieux qu’il a soutenus : Soteria 1971 à 1983 et Emanon de 1974 à 1980. Il ne voulait pas culpabiliser les familles. Ses valeurs fondamentales étaient : Être avec un patient plutôt que de lui faire une thérapie, la communauté est un lieu de sécurité, chaque personne est une ressource, les vérités sont multiples, elles ont intérêt à être entendues dans une polyphonie plutôt que dans un conflit où l’un exclut l’autre, il faut éviter la protection des institutions pour soutenir la subjectivité et l’empowerment de chacun. Je ne cite ici que les valeurs qui m’ont inspiré car il y a toute une littérature en anglais à étudier et à lire.

Vous lirez ainsi le contexte de la Laponie où cette méthode se pratique de manière officielle et gratuite où elle tente d’éviter une hospitalisation. En réalité, tous les professionnels se sont convertis dans des équipes pratiquant l’OD à domicile et mobilisables sans délai.

  • Aide immédiate : C’est l’appel téléphonique qui mobilise l’équipe et tout appel est pris en compte et suivi. Une rencontre peut être réalisée dans les 24h si nécessaire. Cette mobilisation dans le milieu de vie du client et de sa famille peut souvent éviter l’hospitalisation.
  • Perspective d’un réseau social : la famille fait partie de ce réseau social qui peut aussi inclure d’autres proches ainsi que des professionnels. L’équipe OD peut aussi rencontrer certains membres du réseau séparément en cas de maltraitance où de violence. C’est le client qui accepte la présence de son réseau.
  • Flexibilité et mobilité : les réunions se déroulent dans le meilleur emplacement pour les membres du réseau et à négocier.
  • La responsabilité : elle est partagée entre les membres de l’équipe sans référence à une autre autorité. La première personne contactée est responsable de la suite des opérations.
  • Continuité psychologique : La même équipe doit rester en charge de l’ensemble du processus et le réseau social est invité tout au long de celui-ci et aussi longtemps que nécessaire. S’il y a un autre besoin où une nouvelle crise, la même équipe travaillera avec le réseau. Si une thérapie individuelle est conseillée, un membre de l’équipe sera sélectionné pour le faire.
  • Tolérance à l’incertitude : chaque situation de crise est unique et chacun doit se sentir entendu dans un espace suffisamment en sécurité. Travailler en équipe aide à tolérer l’anxiété et l’incertitude. Les conversations réflexives aident à cela. En crise psychotique il devrait être possible de se réunir tous les jours pendant deux semaines pour générer un sentiment de sécurité suffisant. « Aller lentement pour aller vite » permet d’éviter des décisions prématurées. L’équipe pratique l’écoute réflexive comme caisse de résonance par rapport à l’écoute de l’interviewer et ce qu’il communique avec l’interviewé. Ceci permet à ce dernier de se sentir mieux entendu.
  • Dialogue et Polyphonie : l’accent est mis sur la promotion du dialogue non sur le changement. L’équipe suit les thèmes et respecté les manières de parler des membres. Ceux-ci discutent de leurs difficultés et de leurs problèmes. Une nouvelle compréhension se dégage du dialogue avec de nouveaux mots et un langage commun.

D’autres valeurs sont importantes : OD est une façon de penser et d’être en relation. Les principes d’égalité et de respect en confirme le côté humain. Toute crise est une occasion de changement, les symptômes sont des ressources pour donner du sens à la soi-disant folie. La transparence ou l’éthique relationnelle contraint chacun à parler en présence de la personne dont on parle. Nous espérons que d’autres rencontres seront organisées afin de faire parler et de permettre la pratique de cette approche qui conforte les trois parties en trialogue : le souffrant, le proche et le soignant. Une suite est prévue dans le prochain numéro afin de partager des outils dialogiques qui peuvent déjà être utilisés dans les rencontres des équipes qui font du travail à domicile.

Martine Vermeylen

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